© D. Jordan / Ville de Genève

Il s’agit d’un bâtiment singulier et unique en Ville de Genève, un des très rares édifices en Suisse datant de la Restauration. Pourtant, il est resté longtemps négligé, et pas du tout mis en valeur.

Inauguré en 1829, le manège a accueilli, comme son nom l’indique, des chevaux civils puis militaires, pendant un siècle. « Chassés par le progrès » comme il a été dit à l’époque, ils ont ensuite été remplacés par d’autres chevaux, mais qui étaient désormais sous le capot… L’avènement de l’automobile a en effet vu l’ancien manège, considéré alors comme « vétuste et sans grande beauté », être transformé en un garage en 1930, avec la présence d’une pompe à essence. Cela semble aberrant aujourd’hui, mais nous étions à une époque où tout était mis en œuvre pour le développement de la circulation automobile en ville.

Puis au début des années 1950, c’est Jean Camoletti (pour l’anecdote le fils de l’architecte du Musée d’Art et d’Histoire Marc Camoletti), qui intervient alors pour transformer le bâtiment en un parking privé de 73 places sur plusieurs niveaux, à disposition de quelques privilégiés (principalement des cadres de l’administration cantonale). Ce fut une période peu reluisante de son histoire, il faut bien le dire !

Cette triste affectation a été régulièrement remise en cause, par les habitants et habitantes tout comme par des élu-e-s, tant il semblait de moins en moins acceptable ni pertinent de conserver un parking dans un bâtiment patrimonial en plein cœur de la Vieille-Ville. De multiples projets ont été évoqués au fil des ans, dont aucun n’a vu le jour. On a rêvé d’un musée d’art, d’une maison pour étudiants, d’un centre artisanal, et même d’un bar à vin !

Racheté en 2015 par la ville de Genève, le bâtiment avait enfin une chance de se voir remis en valeur. Mais il a tout de même fallu une mobilisation des habitantes et habitants du quartier, puis un processus participatif de six ans pour aboutir à cette magnifique rénovation et la réaffectation du bâtiment en équipement public.

Depuis 2021, ce bâtiment est désormais principalement dédié à l’enfance. Il accueille entre ses murs pas moins de quatre services à la population : une halte-jeux et un espace parents-enfants, un restaurant scolaire, une ludothèque et une maison de quartier. Nous sommes donc passés d’un lieu privé, fermé et sombre, à un espace ouvert, lumineux, accueillant et vivant. 

Les architectes ont fait le choix de ne pas faire table rase des couches architecturales successives, mais au contraire de préserver les qualités de chacune afin de mettre en valeur les affectations passées du bâtiment, tout en l’adaptant aux nouveaux usages, avec un minimum d’intervention lourde.

Tout au long de la rénovation, le choix des matériaux a fait l’objet d’un équilibre délicat entre les besoins des usagers et ceux liés à la conservation du patrimoine, à l’image par exemple des éléments vitrés intégrés dans certaines parois et portes. Cela permet d’apporter une lumière naturelle à l’intérieur des locaux, tout en respectant l’architecture d’origine du bâtiment.

C’est cette attention portée, lors de sa rénovation, à la valeur patrimoniale de ce lieu emblématique qui nous vaut aujourd’hui la visite de Patrimoine Suisse et du fameux Clou rouge !